Le français représente le vecteur majeur de l’intégration sociale et de l’émancipation pour les personnes que nous accompagnons. Elles expriment ainsi leurs besoins : « Je veux faire partie de la société », « Je veux me rendre utile à la France », « Je veux être autonome », « Je veux comprendre ce que les gens disent et parler avec eux ».

Or, vivre en France n’est pas suffisant pour parvenir à apprendre le français. Les parcours extrêmement violents des personnes laissent en elles des séquelles profondes : le manque d’estime en soi, l’impossibilité de reconnaitre leurs propres compétences, la peur du regard d’autrui, de l’erreur et de l’humiliation, les difficultés à faire confiance, à s’investir, à se concentrer, à mémoriser. Ces séquelles les empêchent d’apprendre au même rythme qu’une personne n’ayant pas vécu d’événements traumatisants. Il est d’autant plus important de pouvoir leur proposer une formation de français adaptée. C’est ce que fait l’Atelier Malesherbes.

Toutes les stagiaires bénéficient de 2 séances hebdomadaires d’une durée de 2h, qui sont animées par une professionnelle de Français Langue Étrangère. Il existe 4 groupes différents, chacun correspondant à un niveau de français (débutant et/ou analphabète, élémentaire, intermédiaire et avancé). Les personnes peuvent « monter » de niveau, lorsqu’elles font des progrès.

La plupart des stagiaires démarrent la formation avec un faible niveau à l’oral et à l’écrit. Nombreuses sont celles qui n’ont jamais été scolarisées dans leur pays d’origine. Elles ne savent donc ni lire ni écrire en leur langue maternelle, et doivent apprendre à le faire directement en français. Au vu des difficultés cognitives et émotionnelles évoquées plus haut, avant de progresser en français, toutes les personnes doivent apprendre à apprendre : à avoir un rythme, à saisir une consigne, à mémoriser et organiser de nouvelles informations, à rester concentrées.

La formation de français à l’Atelier Malesherbes permet d’y arriver. C’est un espace sécurisé où la pression et le stress liés à l’apprentissage d’une langue étrangère sont éclatés. Les personnes progressent en y prenant plaisir, grâce à des échanges, jeux de rôle, photos, débats, dictées, reportages, podcasts, films, articles, affiches, réseaux sociaux, documents tirés de la vie quotidienne. La formation est aussi un espace de convivialité et de partage : de connaissances, d’émotions, de pratiques culturelles. La formatrice ne « transmet » pas de savoirs, ce sont les apprenantes qui se trouvent au cœur de l’action, qui s’expriment, s’entraident et se corrigent. Leurs progrès, même minimes, sont toujours remarqués, reconnus et encouragés.

Au fil du temps, les personnes apprennent à maîtriser différentes structures grammaticales et lexicales qui facilitent leur compréhension de ce qui les entoure en France. Elles deviennent autonomes dans leurs interactions quotidiennes (certaines acquièrent même des compétences informatiques de base). Elles apprennent à surmonter tous leurs blocages engendrés par leurs parcours. Elles regagnent en confiance en elles, se rendent compte de quoi elles sont capables, et commencent à envisager de nouveaux projets de vie. Elles se sentent fières d’elles et fortes.

La formation de français complète donc l’accompagnement socio-éducatif au sein de l’Atelier Malesherbes. Les stagiaires ne se contentent pas d’apprendre à parler ou à écrire, elles réapprennent à croire en elles et à se reconstruire. Chaque progrès est une victoire sur les traumatismes passés et une affirmation de leur dignité.